15 semaines après la rupture
- twistedvains
- Aug 6
- 2 min read
Nesso, lac de Côme - un jardin recueillant une variété folle d’odeurs et de fleurs, somptueuses, magnifiques et subtiles. L’excursion annoncée prend des tournures de ballade en voiture, la Mini toit décapoté et les cheveux au vent. Rien de très sportif à siroter un Disaronno en partageant une pizza , ou à regarder les jeunes lézarder sur les rochers au bord de l’eau. Les plus téméraires sautent du pont et se rafraîchissent dans le lac, mais même cela serait trop. A l’avant de la voiture, je m’agrippe à ma vie mais pas très résolument. La vitesse est décoiffante et mon frère ne m’inspire ni sérénité, ni confiance en sa capacité à multitask - à chaque tournant, à chaque tunnel et à chaque accélération injustifiée et disproportionnée, je me vois broyée , dépecée et écartelée de part et d’autre du goudron, collée au plafond et morte j’espère sans douleur. Non, je ne suis pas prête et n’ai pas encore fait assez pour mourir ainsi et maintenant. Je me résous à ne jamais plus me laisser conduire par lui. Je chasse de mon esprit l’idée d’une prémonition macabre ou d’un souvenir d’ancienne vie mais puisque que ce n’est pas que ma peau que je veux sauver. Je prie très fort pour qu’il soit à jamais protégé dans ces instants.
Je rejoins mon ami Flamme à la gare, une tape sur l’épaule et il est là, comme une évidence, après deux nuits parmi les chamois. Un périple où il a étiré les dénivelés , défié la force des cordes et crampons de la via Ferrata, compté les étoiles et s’est réfugié dans un lavoir traditionnel quand l’orage a grondé trop fort. Il fait bon de le voir. L’état de son visage et de son corps démentent l’aventure qu’il a traversée - je m’attendais à le voir plus amoché mais son regard est ouvert et son sourire est franc. C’est une belle victoire pour sa première randonnée après une longue convalescence.
À Milan, je lui prends la main et l’entraîne vers l’oxygène, sur la place de Milano Centrale . Celui-ci est rare et très chaud. On cherche un café en vain et se résoud à une bière dans une pizzeria bondée de familles en repas dominical. Nos discussions se poursuivent sur la politique, la collectivité, la moralité.Sa source et sa destination sont l’anarchie. La mienne aussi mais : une anarchie manifeste en réponse à un ordre divin, une moralité occulte révèlée chez chacun. Son discours est empreint de spiritualité même s’il l’ignore . Son empathie est cultivée dans le mental , sa solution gît dans la lutte, plutôt que dans la transformation par exemple et par tendresse. Je souligne l’anesthésie entière qui l’habite, quand je touche son bras et ne recueille aucun frisson, perdu dans les écueils d’une révolution surtout mentale.
Comments